Journal de bord.
« Notre corps souffre de ce que nous mangeons, non par le manque comme nos aïeux l’ont connu, mais par le trop, le trop vite, l’industrialisation de l’alimentation et par conséquent, notre santé n’est que le reflet de nos compensations. »
Pendant mes sept jours au centre de santé « La maison de Sania » en aout 2019, j’ai tenue un journal de bord, afin de prendre du recul sur l’évolution de cette expérience. Je vous le partage dans cet article. Quand nous ne mangeons pas, le corps peut enfin se nettoyer des toxines accumulées, renforcer ses défenses immunitaires par le biais de notre flore intestinale, régénérer nos cellules et bien d’autres choses encore. Ceci, dans les deux sens du terme : Il se nourrit par ses réserves, se nettoie, se désintoxique et se régénère. Cette « auto-restauration » est aussi appelée en terme médical, l’autolyse. Dans nos vies aux sollicitations multiples, les informations arrivent en masse sans avoir le temps d’être digérées,l’abondance génère trop d’envies, trop de besoins, trop de superflus. Il se crée par conséquence, trop de manques, trop de frustrations et trop d’angoisses non maîtrisées. Nous devons apprendre à nous poser, marquer un arrêt et retrouver la maîtrise des flux. Permettre ainsi à notre esprit de souffler, de se ressourcer et de se retrouver afin de clarifier ses pensées, ses analyses et ses décisions. Je le répète quand même, je ne fais pas l’apologie de cette pratique. Je l’ai testé, et je viens juste partager ce qu’il en est ressorti pour moi, sur mon corps.Voici comment s’est passé ma semaine :
JOUR 1
Lundi matin, 1er jour. Je suis arrivée hier vers 17h, la maison est super grande, agréable et confortable. Nous sommes un groupe de 12 et la cohabitation commence bien. L’expérience commence, on se croirait un peu dans une télé réalité enfermés dans notre loft. Il paraît que pendant un jeûne, on dort très mal. Le système digestif est tellement ralenti, ce qui nous donne un surplus d’énergie. Je confirme, j’ai dormi à peine 5h. Je suis dans la chambre dortoir avec 3 autres filles. Déjà 24h sans manger, pour moi c’est un exploit, je me sens fière. Je me suis réveillée plusieurs fois, surtout pour aller aux toilettes, on élimine aussi beaucoup. Ma tête et mes reins me font souffrir, mais c’est le jeux, le travail commence. Je ressens beaucoup la faim, et mon mental est très actif, comme pour compenser ce manque, c’est très désagréable. Je me lève vers 8h et descend dans la cuisine rejoindre les autres pour boire le petit jus du matin, un pomme/carotte/gingembre, que je prend le temps de savourer. Nous avons ensuite une conférence sur la marche afghane, je ne connaissais pas et c’est un outil assez pratique pour le souffle au cours de la randonnée. Il est temps de se mettre en route et de mettre tout ça en pratique ! Tout le monde enfile ses chaussures et nous partons dans les bois pour 8km. Je me concentre beaucoup durant cette marche pour garder un bon rythme, mais je sens que je n’ai rien dans le corps, et ça n’aide pas. Mais je redécouvre déjà l’odeur des Douglas, des fleurs sauvages… Je les avais oublié, je n’y prêtais plus attention. Mes sens se redéveloppe déjà, et je prend le temps d’apprécier tous les cadeaux de la nature. Je me sens en communion avec elle. Je vois même au loin, un cerf qui passe furtivement. C’est magique. Avec ma concentration sur le souffle, je sens mon cerveau qui est 2x plus oxygéné. Par moment j’accélère le pas et je me sens pousser des ailes, par moment je faibli, j’ai mal au hanches et aux jambes. Une fois rentré, je vais m’écrouler sur mon lit au moins 45min. Je suis HS. Je prend ensuite une bonne douche tiède et le jus vert de l’après midi. La maison est très calme. Il y a un peu de soleil sur la terrasse, je m’installe avec un livre sur un transat. J’ai l’impression d’être dans une maison de retraite. J’ai toujours faim… Je bois beaucoup d’eau par obligation et pour me remplir, mais je passe mon temps aux toilettes. Vers 17h30/18h, nous avons droit à un bol de bouillon (sans sel!).
JOUR 2
Mardi, jour 2. Cette nuit fut meilleure, bien plus profonde. Avec des cauchemars cependant, mais j’ai l’habitude. Par contre le réveil est très dur. J’ai des palpitations et des nausées assez fortes. Je sens que je n’arriverai pas à me lever, et que si j’y arrive, je vais devoir foncer aux toilettes. Bon, je prend le temps de respirer et de rester un moment au lit pour que ça passe. J’ai la sensation d’être engourdie, de ne plus savoir bouger. Heureusement que Michèle nous avait prévenue pour les symptômes ! Je me lève péniblement, j’ai la langue très blanche, très chargée. J’entends en bas le « bip bip » du tensiomètre, chacun veut voir où il en est ! Je n’arrive pas à me tenir debout dans la salle de bain, heureusement qu’il y a un bon fauteuil moelleux. Je descend lentement les rejoindre, je vais me faire un gargarisme à l’huile de sésame pour ma langue, et je prend ma tension à mon tour. Elle est à 9, tout ce qu’il y a de plus normal pour un jeûneur. Il y a un cours de yoga à 9h, mais je préfère ne pas y aller pour me reposer, je ne me sens pas la force. Je vais donc prendre un bain de soleil sur la terrasse. Vers 11h, départ de la marche. Ils proposent une petite de 5km (que je vais suivre) et une grande de 10km. Les gens commencent tout comme moi à se sentir faible et nauséeux. On se sent moins seul dans ces cas là ! Nous faisons tous connaissance petit à petit, et prenons soin les uns des autres. Une fois rentré, je fais une sieste. Un sauna est également à disposition, je décide de le tester une quinzaine de minutes, et ça me fait le plus grand bien. Ensuite on s’occupe, on se repose, je discute avec mes voisines de chambre, je lis… Vers 17h30 nous avons toujours une « activité » proposée. Aujourd’hui, un documentaire sur le jeûne ! Très instructif. Nous nous installons dans les canapés, sous nos plaids avec notre petit bouillon quotidien. Ensuite, deux bénévoles viennent nous faire participer à un atelier de « OM chanting ». On s’installe tous en cercle sur des chaises et nous chantons le son OM pendant 30 min. C’est un exercice auquel beaucoup n’adhère pas, mais moi j’adore. Il y a une énergie qui se dégage qui est incroyable, encore une fois il est question de lâcher prise et de ressentis. Je me sens vraiment mieux ce soir, je n’ai plus faim et je suis apaisé. J’ai également un petit carnet de bonnes résolutions qui se rempli à vu d’œil !
JOUR 3
Mercredi, jour 3. Toujours une nuit profonde et des rêves étranges. J’ai de moins en moins mal aux reins la nuit, c’est appréciable. Au réveil, je n’ai plus de nausées, alors je me lève d’un pas décidé. Seulement une fois debout, les vertiges et les palpitations reprennent. Ma tension ce matin est toujours à 9. Les autres non plus ne sont pas en grande forme. He oui, le 2em et 3em jours sont connus pour être les plus difficiles en terme de symptômes ! Je décide de participer à la séance de Yoga proposé ce matin. La prof s’adapte très bien à notre état un peu léthargique, le cours se passe donc très bien, et chacun va à son rythme. Même si on est tous un peu patraque, on garde le sourire et il règne une bonne ambiance et une bonne humeur constante dans le centre. On fait des blagues, on respecte aussi les autres et on les aide. On se sent comme à la maison !
On entame ensuite une balade de 7km, bien assez pour moi. Je refais une petite pause sauna dans l’après midi pour me réchauffer. Car oui, mon corps se régule. J’ai très chaud la nuit et le matin, très froid l’après midi. Je suis assez fatiguée, comme les autres, on marche tous au ralenti.
« Dans le calme du centre, on entend les mouches voler et les ventres gargouiller »
Michèle prend soin de moi et de tous les autres, elle nous apprend beaucoup. J’ai l’impression d’être dans un état grippal, le tout c’est de l’accepter et de savoir se reposer, le processus est normal. Je vis le moment présent de manière forcé, et j’apprécie plus que jamais. C’est une expérience incroyable, mon esprit s’ouvre et se libère. Je sourie à longueur de journée, j’apprécie ce qui est, sans jugement. Ce soir, je ne prend pas de bouillon, j’en suis écœurée. Et je ne suis pas la seule, en général on s’en lasse au bout de quelques jours… Normalement, demain mon corps sera en autolyse, et je devrai me sentir bien mieux !
JOUR 4
Jeudi, jour 4. La nuit fut courte et agitée cette fois, j’ai très mal dormi. Mais les bouffées de chaleur on disparues. Les symptômes viennent et repartent, le corps travail vraiment. Je vois mon poids qui diminue sur la balance chaque matin. Comme l’avait annoncé Michèle, je perd 1kg chaque jour. C’est assez impressionnant. J’ai des crampes atroces derrière les mollets, chaque pas est un calvaire. Je peine un peu à cause de ça pendant la balade. Mais j’ai moins le tournis, j’ai l’impression de me stabiliser, d’accepter ce changement et de laisser faire. Je n’ai pas le choix, je suis là pour ça ! Nous avons tous pris le rythme de la maison, chacun vaque à ses « occupations ». Lire, prendre une douche, faire un sauna, se faire une tisane… Voilà le planning. Je suis néanmoins très fatigué et j’ai toujours envie de dormir. Je m’arrête un peu partout pour m’allonger, lit, canapé… Plus le temps passe, plus on parle de nourriture. A vrai dire, on ne fait que ça ! On salive sur des plats à longueur de journée, on invente des nouvelles recettes, on partage nos secrets culinaires… Bien que la faim n’est plus réellement là, l’envie de manger par contre, ne nous quitte pas. J’ai des flash de choucroute, de riz cantonais… En promenade, il y avait un morceau de pain brioché par terre au coin d’une rue, j’avais presque envie de le ramasser et de le manger ! Je suis passé à côté en le regardant comme le saint Graal. Je me suis mise à tomber amoureuse de la nourriture, à vouloir la sentir, la sublimer, la chérir… Sans avoir faim ! Quand on jeune, on se rend compte de la chance qu’on à de pouvoir manger, d’avoir accès à ce plaisir. Alors pour la première fois de ma vie, j’ai eu envie de cuisiner, de m’investir à ce niveau. J’avais une nouvelle résolution à inscrire dans mon carnet !
JOUR 5
Vendredi, jour 5. Nuit toujours agitée et courte. Ça y est, J-1 avant la reprise alimentaire. C’est demain ! On est tous plus enthousiasme, surtout moi. Je suis heureuse de l’expérience mais j’ai aussi hâte qu’elle se termine. Je me lève très bien, mais je n’ai pas plus envie que ça de participer à l’activité du matin. Donc, je reste tranquille à me reposer. Mais je recommence à me sentir très faible bizarrement… Dès que je me lève, j’ai des points noirs devant les yeux. Je me force au repos, mais ça ne passe pas. Michèle me propose de prendre de l’eau de Quinton, sel d’eau de mer afin de me sentir mieux. Je prend une dose, et nous partons en balade de 5km. La marche est pénible, j’aurai peut être du resté couché. Je me concentre sur la route et parle le moins possible. Je me traîne, je suis la dernière. Lucas, le fils de Michèle, dirige la balade et veille sur moi, il me parle, m’encourage. Il me dit aussi que c’est une bonne chose de venir marcher quand on se sent mal, sinon ce serait pire. Je pourrai perdre du muscle et m’affaiblir encore plus. Le tout est de marcher lentement. J’étais… Un escargot ! Enfin rentré, je m’écroule dans mon lit pendant une heure. Mon corps est douloureux, les palpitations sont revenues… Alors en allant chercher mon petit jus de l’après midi dans la cuisine, j’en profite pour prendre ma tension. Elle est de 8,5. Ceci explique cela. J’accepte. Je pars m’installer dans un transat et je ne bouge plus.
JOUR 6
Samedi, jour 6. Voici venir le jour de la reprise alimentaire ! Je me sens toujours faible en me levant, aucune amélioration. Pour préparer les intestins à recevoir de la nourriture, Michèle nous à préparé le petit déjeuné adéquat. Deux pruneaux, avec des graines de lins qui ont trempées pendant la nuit. Je m’installe à table avec tout le monde pou ce festin. Je savoir chaque millimètre de pruneau, et j’avale lentement mes graines de lins, comme préconisé. Je prend tout le temps nécessaire, et réalise l’importance de manger et déguster très lentement. Un de mes gros défauts : je mange trop vite. Comme la plupart d’entre nous… Erreur ! Nous allons ensuite visiter un verger, et ses produits locaux. Ma tension est toujours de 8,4, mais je décide d’y aller quand même, même si Michèle préférerait que je me repose. Elle a raison, mais je ne m’inquiète pas pour mon état. Après cette sortie délicieuse par un jour d’août presque hivernal, on rentre au chaud. On a même décidé d’allumer la cheminé ! Nous voilà blotti dans nos plaids, absorbés par la beauté des flammes qui tapent contre la vitre de l’insert. Michèle vient briser ce silence pour nous annoncer que le repas de midi est servit ! Un demi avocat pour les femmes, un avocat entier pour les hommes. Merveilleusement présentés dans le service aux assiettes norvégiennes fleuries. Parsemés de graines germées, graines de chanvre et un filet de citron. Là encore, on savoure ! On apprécie chaque bouchée et on redécouvre chaque saveurs. C’est le bonheur.
L’après midi est libre, certain font la sieste au coin du feux, d’autre prennent un bain, d’autre encore sont partis faire des courses dans les magasins bio aux alentour. Le soir, la véritable reprise alimentaire commence ! Michèle et d’autre ont participé a l’élaboration de notre festin. Au menu : Brocolis vapeur et butternut, gigantesque salade avec une sauce noix de cajou/orange, pomme de terre, chips de patate douce et panais… Les quantités me paraissent énorme. Et à 17h30, aucun ventre ne gargouille, la faim n’est pas là. Mais les visages sont souriant, et la convivialité d’un repas partagé nous ravis ! Là encore, je m’efforce de manger le plus lentement possible, et me voilà bien vite rassasié. La moitié du groupe est parti après le repas. Pour ceux qui reste, dont moi, on repartira tous demain matin. L’ambiance est calme, un petit film tous ensemble est de circonstance. On s’installe, le feux s’éteint, et la nuit tombe bien vite.
Je suis donc repartie chez moi le dimanche matin. J’étais encore assez faible. Il y avait sûrement une légère amélioration grâce a l’excitation de retourner chez soi et d’avoir remangé, mais je suis quand même resté perplexe quant à mon état, tout comme pour Michèle qui m’a affirmé que je faisais parti des rares cas à se sentir aussi faible à la sortie d’un jeûne. Et en effet, j’étais la seule parmi le groupe. Il y a tout un tas de raison à cela :
- Chaque corps, chaque organisme, chaque personne est différent(e)s
- Le jeûne se joue aussi d’un point de vue émotionnel
- Le rééquilibrage hormonal
- La fatigue et le stress accumulés, etc…
Voici par exemple les causes de cet état de faiblesse qui perdure. Mais selon les spécialistes du jeûne, c’est assez rare que l’on ressorte affaibli d’une cure. Mais chaque corps a son rythme. Et il faut bien des exceptions pour confirmer la règle !
Cet article à donc été partagé pour vous donner un aperçu, un récit de mon expérience. Vous aurez sûrement remarqué ma vidéo qui précède cet article, où je parle plus en détail de ce sujet qui est le jeûne, au sens plus large. J’y partage d’autres aspects de mon expérience. N’hésitez pas à la visionner en complément. Merci de m’avoir lu.